Je suis debout, à l'aube, le sac prêt, impatiente de quitter Chinguetti.
Enfin, Lella est là, dans l'embrasure de la porte, djellaba blanche et chèche noir. Il est superbe. Je suis fière d'être son amie. Nos yeux sont en attente du partir. Nous savons notre route. Nous la poursuivons dans le respect mutuel de notre amitié.
Nasser, l'aubergiste, nous accompagne. Ayant fait des études de géographie à Nouakchott, il s'exprime parfaitement en français. Son accoutrement me fait sourire : une veste de laine sur sa djellaba et des chaussettes trouées pour mieux enfiler les tongs !
Nous avons sympathisé la veille, lors de mon arrivée, et sa demande de nous accompagner consiste à être l'interprète.
Les chameaux sont prêts, chargés de soixante litres d'eau, de nourriture et de couvertures.
Au milieu des dunes, nous avançons. Le soleil est boule de feu au-dessus de la tête.
Je marche, respirant à chaque pas la vraie liberté, celle qui me rattache à moi-même, celle que je dédie au monde. Le paysage est splendide. Sur le chemin de l'inconnu, les formes ouvragées par le vent prennent vie en une cascade de dunes et de contrastes.
Malgré les rayons ardents du soleil et la soif qui dessèche les lèvres, je suis pleinement. La palette des ocres m'invite au rêve. Nous marchons rapidement, nous enfonçant dans ce sable que je suis venue reconquérir comme une nécessité. Ces mois ont été une pensée constante vers ce minéral, comme un appel inéluctable.
Sous le soleil aveuglant, je redécouvre la beauté désertique, le plaisir d'avancer vers le rien, et la fusion silencieuse avec mes amis.
Une première journée, telle que je l'avais rêvée, belle, simple et harmonieuse.
Au milieu du sable, le campement est dressé. Le soleil devient braise vacillante. Le feu crépite pour un simple repas, pour un bien-être après l'effort. Dans la nuit étoilée, je pars récupérer les chameaux avec Lella. Nous sommes au-delà du temps. La voûte du ciel est complice de notre liberté. Les dunes nous encerclent et nous communions dans la douce nuit qui marche.
Sous les astres qui scintillent, je me rejoins doucement pour ne pas troubler la paix du désert. Je m'endors, sereine, contre le chaud des sables.
Le soleil rougeoît à l'horizon. Lella et Nasser prient. Le petit déjeuner est silencieux, autour du thé et de la galette. Tandis que Lella cherche les chameaux, Nasser et moi effaçons toute trace du campement. Le bois à demi-calciné est rangé consciencieusement. Il est précieux car rare. Il servira à d'autres nomades de passage dans ce coin isolé. La fraîcheur matinale s'estompe rapidement pour faire place à une chaleur torride. Pas une miette de vent pour rafraîchir les visages cachés sous le chèche. Pas une once d'air pur pour ponctuer la marche. La lumière vive et impénétrable du soleil est comme une aile immense sur cette terre chaude et sableuse.
Il me faut seulement doser la respiration, me concentrer sur le rythme, sur l'horizon. Je me noie dans une splendide mer de dunes et je suis écrasée de soleil. J'ai soif, avec cette sensation que rien ne pourra jamais me désaltérer. Quelques gouttes de salive humectent mes lèvres desséchées. Tout est immensément brûlant.
Je marche dans la fournaise.
Le temps s'estompe. Mes points de repère se brouillent. Je redeviens nomade, seule avec moi-même. Les heures passent sans moi. Mes pas m'entraînent encore un peu plus loin dans l'oubli, chaque dune franchie me séparant de moi-même.
Courte halte pour boire. Yeux fermés, l'eau coule en moi.
Je rêve de cascade …
Mes pieds souffrent, une grosse ampoule entame le talon droit.
Et le soleil comme un brasier au milieu des dunes qui s'effacent pour faire place au reg.
Du sable et des pierres pour seul horizon.
Le regard de Lella et Nasser pour seul repère.
A la tombée du jour, le chèche devient écharpe. Les gouttes de sueur sèchent et je ressens la douce tiédeur du soir. Notre campement est sommaire mais il me convient bien : le sable sous le corps, la caresse du feu sur les joues et la caresse du vent dans les cheveux.
J'ai oublié d'où je viens; je redécouvre qui je suis. Ce que je suis : une errance dans le temps, en quête de vérité. Elle est entre mes doigts. Tourbillon de tendresse et de promesse.
L'arrivée d'un nomade, surgi de nulle part, me tire de mes songes. Il partage notre repas et nous invite à boire le lait de chamelle et le thé. Dans la nuit aux étoiles filantes, nous marchons vers la tente où sa famille nous accueille avec gentillesse. Grande discussion sur Dieu et ses insondables mystères.
Le retour est gai. Je n'ai pas sommeil.
Etoiles-lumière … les cieux épousent le sable, mon corps niché en eux. Multiples étreintes à ce corps inassouvi, à ces yeux pleins de rêves.
Je me couche contre mes flancs, ma bouche gardant le goût du sable.
Je me détache de tout, comme une nécessité absolue.
Vent muet. Silence du ciel. Parenthèses dans une vie qui se referme.
Sable-vérité. Ma vie se déroule dans ma mémoire.
Je suis seule. Seul désert-confiance.
Enfin, Lella est là, dans l'embrasure de la porte, djellaba blanche et chèche noir. Il est superbe. Je suis fière d'être son amie. Nos yeux sont en attente du partir. Nous savons notre route. Nous la poursuivons dans le respect mutuel de notre amitié.
Nasser, l'aubergiste, nous accompagne. Ayant fait des études de géographie à Nouakchott, il s'exprime parfaitement en français. Son accoutrement me fait sourire : une veste de laine sur sa djellaba et des chaussettes trouées pour mieux enfiler les tongs !
Nous avons sympathisé la veille, lors de mon arrivée, et sa demande de nous accompagner consiste à être l'interprète.
Les chameaux sont prêts, chargés de soixante litres d'eau, de nourriture et de couvertures.
Au milieu des dunes, nous avançons. Le soleil est boule de feu au-dessus de la tête.
Je marche, respirant à chaque pas la vraie liberté, celle qui me rattache à moi-même, celle que je dédie au monde. Le paysage est splendide. Sur le chemin de l'inconnu, les formes ouvragées par le vent prennent vie en une cascade de dunes et de contrastes.
Malgré les rayons ardents du soleil et la soif qui dessèche les lèvres, je suis pleinement. La palette des ocres m'invite au rêve. Nous marchons rapidement, nous enfonçant dans ce sable que je suis venue reconquérir comme une nécessité. Ces mois ont été une pensée constante vers ce minéral, comme un appel inéluctable.
Sous le soleil aveuglant, je redécouvre la beauté désertique, le plaisir d'avancer vers le rien, et la fusion silencieuse avec mes amis.
Une première journée, telle que je l'avais rêvée, belle, simple et harmonieuse.
Au milieu du sable, le campement est dressé. Le soleil devient braise vacillante. Le feu crépite pour un simple repas, pour un bien-être après l'effort. Dans la nuit étoilée, je pars récupérer les chameaux avec Lella. Nous sommes au-delà du temps. La voûte du ciel est complice de notre liberté. Les dunes nous encerclent et nous communions dans la douce nuit qui marche.
Sous les astres qui scintillent, je me rejoins doucement pour ne pas troubler la paix du désert. Je m'endors, sereine, contre le chaud des sables.
Le soleil rougeoît à l'horizon. Lella et Nasser prient. Le petit déjeuner est silencieux, autour du thé et de la galette. Tandis que Lella cherche les chameaux, Nasser et moi effaçons toute trace du campement. Le bois à demi-calciné est rangé consciencieusement. Il est précieux car rare. Il servira à d'autres nomades de passage dans ce coin isolé. La fraîcheur matinale s'estompe rapidement pour faire place à une chaleur torride. Pas une miette de vent pour rafraîchir les visages cachés sous le chèche. Pas une once d'air pur pour ponctuer la marche. La lumière vive et impénétrable du soleil est comme une aile immense sur cette terre chaude et sableuse.
Il me faut seulement doser la respiration, me concentrer sur le rythme, sur l'horizon. Je me noie dans une splendide mer de dunes et je suis écrasée de soleil. J'ai soif, avec cette sensation que rien ne pourra jamais me désaltérer. Quelques gouttes de salive humectent mes lèvres desséchées. Tout est immensément brûlant.
Je marche dans la fournaise.
Le temps s'estompe. Mes points de repère se brouillent. Je redeviens nomade, seule avec moi-même. Les heures passent sans moi. Mes pas m'entraînent encore un peu plus loin dans l'oubli, chaque dune franchie me séparant de moi-même.
Courte halte pour boire. Yeux fermés, l'eau coule en moi.
Je rêve de cascade …
Mes pieds souffrent, une grosse ampoule entame le talon droit.
Et le soleil comme un brasier au milieu des dunes qui s'effacent pour faire place au reg.
Du sable et des pierres pour seul horizon.
Le regard de Lella et Nasser pour seul repère.
A la tombée du jour, le chèche devient écharpe. Les gouttes de sueur sèchent et je ressens la douce tiédeur du soir. Notre campement est sommaire mais il me convient bien : le sable sous le corps, la caresse du feu sur les joues et la caresse du vent dans les cheveux.
J'ai oublié d'où je viens; je redécouvre qui je suis. Ce que je suis : une errance dans le temps, en quête de vérité. Elle est entre mes doigts. Tourbillon de tendresse et de promesse.
L'arrivée d'un nomade, surgi de nulle part, me tire de mes songes. Il partage notre repas et nous invite à boire le lait de chamelle et le thé. Dans la nuit aux étoiles filantes, nous marchons vers la tente où sa famille nous accueille avec gentillesse. Grande discussion sur Dieu et ses insondables mystères.
Le retour est gai. Je n'ai pas sommeil.
Etoiles-lumière … les cieux épousent le sable, mon corps niché en eux. Multiples étreintes à ce corps inassouvi, à ces yeux pleins de rêves.
Je me couche contre mes flancs, ma bouche gardant le goût du sable.
Je me détache de tout, comme une nécessité absolue.
Vent muet. Silence du ciel. Parenthèses dans une vie qui se referme.
Sable-vérité. Ma vie se déroule dans ma mémoire.
Je suis seule. Seul désert-confiance.