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Quai Docteur Girard - 38520 Le Bourg d'Oisans, Alpes du Dauphiné - Isère, France

samedi 22 août 2009

Femme du désert … femme d’un ailleurs …
Egarée dans l’immensité, je suis femme à la conquête de la liberté. Jour après jour, à l’écoute du sable, je suis femme amoureuse d’infini pour qui l’oubli d’hier est symbole de lumière. Nuit après nuit, je suis femme en quête de mirages, perdue dans un océan sauvage où les feux du ciel sont étincelles dans l’univers.
Femme, seulement femme dont le nom s’évanouit dans les sables-poussières. Je suis pleinement femme, sans identité, mais tellement moi. Je donne au vent, au soleil, aux étoiles, les cinq lettres de « Marie » pour qu’elle s’endorme à jamais dans les bras des dunes.
Lella entonne le chant des nomades, avec force, avec foi, pour mes épousailles avec le désert. Je frissonne au son de la voix puissante qui résonne à l’infini. Mon chèche est voile tandis que mes yeux ne voient plus le désert. Ils sont désert. Ils accompagnent, par delà les sables, l’écho de ce chant profond et sensuel. Les notes s’élèvent, vibrantes et pleines et vont mourir dans les cieux étoilés. Ce chant m’est dédié dans le grand silence saharien, pour que chaque son soit l’empreinte de mes pas dans le néant, pour que mon corps brûle toujours des mêmes désirs sur les chemins du rien, pour qu’enfin ce chant ancestral des nomades que j’entends pour la première fois soit à jamais en moi comme le cadeau de bienvenue au milieu des siens.
Ce chant m’étreint, poussière de musique dans les millions de poussières qui nous entourent, mes mains ouvertes autour du feu, imprégnée de la magie du désert qui ose pousser les limites de la paix intérieure aux portes d’un chant grave et serein. Il ne s’éteindra plus jamais en moi, et je reste là, immobile, silence parmi le silence, me noyant dans le désert. Son chant meurt sur la plainte du vent, et Lella, doucement, murmure : « Zeine Hata » … Tout bascule en moi. Je veux me noyer encore et encore dans la musique du désert, celle qui ensorcelle pour mieux m’enfanter. Je palpite dans le sombre des yeux qui me lie à la sensualité sauvage d’un désert-amant. Et pourtant, je ne bouge pas, incapable du moindre mouvement, toute entière à l’écoute d’un corps qui aime passionnément chaque miette d’un temps qui n’existe plus depuis longtemps, d’un corps qui caresse chaque grain de sable, d’un corps à l’unisson d’un plaisir sans nom qui me laisse ivre d’émotion et libre, tellement libre …
Enfin, j’entends les lèvres muettes des chameliers qui prient.
Enfin, il me faut quitter ces terres vierges, vertigineuses de plaisir pour renouer avec moi.
Je m’allonge face au ciel, yeux fermés, dépossédée de moi, vide de moi. Je me laisse dériver dans le néant des pensées ; je veux seulement chavirer sur la houle de la tendresse pour cicatriser les blessures d’un plaisir infini, celui qui laisse pantelante de trop désirer. Le désert me fait l’amour si souvent, et je fais depuis si longtemps l’amour avec lui. Il repousse toujours plus loin mes attentes et mes exigences. Un amant aux couleurs d’un infini doré et lumineux qui éclaire mon âme de tant de feux et de tant de dons …
Le silence de la nuit m’engloutit avant de sombrer dans un sommeil sans rêve.

... Femme d’un jour, d’une nuit et de tant de jours et de tant de nuits …
Femme nomade d’un désert qui emprisonne plus fort que les serres.
Femme errance d’un horizon qui enferme plus fort que la prison.
Femme passion d’un désert qui brûle plus fort que les tisons.
Femme existence d’un toujours qui se désire plus fort que l’amour.
Femme sauvage d’un infini qui se donne plus fort que la vie.
Femme du désert ; femme de l’intemporalité ; femme d’un ailleurs.
Femme … elle …
Les nuits ont été étincelles pour une femme qui se voulait elle.
Les nuits ont été dérive pour une femme qui désirait vivre.
Les nuits ont été sérénité pour une femme qui cherchait la vérité.
Les nuits ont été abandon pour une femme qui voulait la passion.
Les nuits ont été reflets pour une femme qui espérait la paix.

A l’aube d’elle, elle a marié la démesure et le rêve à l’aurore de l’autre.
Pas après pas, elle a appris le désert près de celui qui savait conter les mystères.
Elle a su se mêler à l’infini sauvage près de celui qui savait déchiffrer les nuages.
Elle a écouté l’appel des sables près de celui qui savait entendre l’impalpable.
Elle a prié dans l’obscurité des cieux près de celui qui parlait à Dieu.
Elle a fermé les yeux près de celui qui chantait le merveilleux.
Elle a confié sa vie à celui qui veillait sur ses nuits.
Ella a vu l’aura du désert près de celui qui rayonnait de lumière.
Elle a marché longuement près de celui qui était désert.
Elle … moi … tellement elle, tellement moi …

Mon histoire est là, simple de passion dévorante et d’amour infini. Je l’ai construite, pas après pas, pour me libérer et aimer sans limites. J’ai bâti ma Légende au creux d’un désert dont les poussières d’or s’envolent quand le vent chante l’immensité de l’Amour.

Quand je suis loin des sables, il me suffit de fermer les yeux pour me noyer dans l’infinitude d’un regard, d’un chant ou d’un silence, pour que je sois nomade, totalement nomade et seulement nomade.

mardi 4 août 2009

Au fil des dunes et des crépuscules pourpres, je ne transporte que ma carcasse libérée de tout carcan et il est bon de se savoir désenchaînée et forte d’un autre devenir. La vie me transperce de toutes parts, sans un instant de répit, sans cesse en défi avec moi-même. Une vertigineuse énergie me bouffe et me subjugue. J’avance dans l’unicité de mon être reconstruit, remodelé et reconsolidé.
Chaque bivouac est une ode au jour qui se meurt et chaque bivouac est un pas accompli vers ma destinée. La Vallée Blanche se creuse des sillons des oasis ou des palmeraies pour offrir quelques heures plus tard le paysage des dunes épousant les montagnes.
A califourchon sur ma vie, j’esquisse des dessins oniriques aux couleurs chaudes et tendres, des teintes fugaces ou ensorcelantes qui se prennent aux pièges des voiles sahariens. L’alchimie du désert fait exploser des éclats de pureté et de profondeur.
La lune me fait un clin d’œil, halo laiteux avant de disparaître dans l’incommensurable. Complice de ma destinée puisque je lui parle chaque soir, elle m’accompagne dans mes dérives qui se perdent dans les contours de la nuit. Je refuse le sommeil pour bavarder avec le silence. Je refuse de dormir pour mieux vivre. Tout est jouissance dans l’immobilité du corps, dans le bouillonnement des pensées et dans le gigantisme des sensations. Je plonge dans le dépaysement de ma vie, et je bois goulûment aux rêves qui me sont offerts. Dans le fantastique de la nuit, les mythes dansent au cœur de ma vie et m’entraînent sur les chemins de nulle part. Aucun désir de me désenvoûter des sortilèges du désert ; je suis trop bien dans les bras de la passion, sur les berges idylliques d’un désert qui me possède. Le vertige de la nuit m’étreint sur le chant intarissable de la contemplation. Là, dans les entrailles de ma vie, je vole vers les immensités inviolées qui me sont offertes comme le plus merveilleux des cadeaux. Comme un fruit pulpeux dont la chair serait pleine et tendre, je me laisse dévorer doucement jusqu’au petit matin. Les lèvres de la nuit me caressent pour m’emporter dans les songes les plus fous. Le voile de la conscience se déchire alors et comme un diamant brut, mon corps se laisse polir, façonner par les mains mystérieuses et satinées de la nuit. Je ne compte plus les lambeaux de ce qui fut moi, abandonnés au fil des pas, pas plus que les morceaux de mon âme éparpillés au gré du vent. L’aurore me trouve blottie dans un écrin de douceur infinie, affamée d’un autre jour, d’un autre moi-même.

Au fil du temps, mon baluchon se fait léger comme l’air que je respire à pleins poumons. Il s’est délesté du poids du passé. Je vagabonde allégrement sur le présent de ma vie. Je n’attends rien et ne veux rien, rien que cette magie d’être « une ». Je me retrouve unifiée, au milieu d’un désert qui ne ment pas.
Voyageur sans limites ni attaches, je me mêle aux paysages, décryptant chaque jour les messages des sables brûlants et des mirages. Je ne veux que le silence pour unique danse. Jour après jour, je calfeutre mon âme dans un écrin de solitude totale et me perds dans la toile des errements quand la nuit surprend le campement. Sur les dérives de ma foi, mes pas ne sont que poursuite pour palper les non-dits écrits dans les poussières opuscules. Les braises éclairent mes attentes, inscrites sur les pierres brunes, comme autant de mots pour balayer ma fuite.
Dans cet erg immense, je me nourris du plein silence et des regards intenses, du vent déchaîné et des pas mêlés, des brûlures du soleil et du froid des veilles. Je longe les crêtes, balayées par les vents, les gravis pour dominer le monde et me surpasser. Je vais vers ce rien qui se dessine comme une ligne invisible dans les tourbillons blancs du chant des dunes. Et dans le calme du désert, je mords la poussière, bras grands ouverts pour accueillir la terre.

lundi 3 août 2009

Je n’ai aucune peur du désert, ni aucune peur de ma vie, de l’échéance d’une vie. Je n’ai aucune peur des brumes balayant les décombres de mon passé. Je n’ai aucune peur du poids du silence sur le manuscrit de ma vie. Je n’ai aucune peur du lendemain, de ce jour d’après la nuit qui engendre les réveils pleins de promesses … le réveil du désert plein de vie contenue, de vie que l’on sent sourdre de la terre, de cette terre stérile en apparence et pourtant riche de mon devenir, de ce bouillonnement de vie dans chaque grain de sable qui ponce l’être humain jusqu’au noyau. Le livre de ma vie ne parle d’aucune peur que pourrait engendrer la solitude du désert. Aucune peur face à moi-même, face à la vie, face à la mort. Jaillissement extraordinaire de sève jusque dans les prémices d’un inéluctable départ. Le désert épouse la vie, comprend la mort pour mieux aimer la vie. Non, aucune peur de l’abandon de la vie puisque le désert me montre le chemin de la vraie liberté dont je saisis le sens profond en me nourrissant de sable et de vent.
… Des lendemains comme aujourd’hui ou comme hier dans la fugacité de l’éternité …
Je nourris le brasier de ma vie aux feux de la solitude et de l’abandon. J’aimerais que le désert m’initie à tous ses secrets. Alors je suis sans complaisance avec moi-même ; je me dépouille de tout pour tenter de comprendre.
Parcours sans cesse initiatique qui érode un peu plus l’écorce de ma vie, que je gratte pour en extraire le suc. Je marche, étreignant la prière de la vie sur l’autel du désert.
Comme un alléluia face à l’horizontalité, je me meurs à chaque pas pour renaître à cette autre vie, pour me déshabituer de toutes ces années d’à-peu-près que je transporte malgré moi, pour réapprendre à vivre … s’il en est encore temps.

La Vallée Blanche est une procession d’oasis immergées au cœur des dunes. Quand la fatigue se fait sentir, l’or des sables me murmure les contes de ce grand Sahara qui n’en finit pas de ressusciter. Et comme par miracle, des ondes d’énergie m’envahissent pour me faire avancer, encore et toujours. Quand les efforts sont récompensés par la paix des bivouacs et l’histoire du ciel étoilé, ma vie devient transparente et limpide comme l’eau. Mon habit se détache et l’arbre de vie se dessine alors au cœur de ma nudité, tronc s’élançant sans ramification, tourné vers l’Essentiel, ayant rejeté les faux-semblants. Ca fait mal de se desquamer, d’apprendre à désaimer ce qui n’est pas important, de s’abandonner à une autre dimension pour qu’enfin la vraie source de vie éclate en soi.
Je vis chaque soir cet éblouissement de perte d’identité pour me façonner un autre devenir, un autre « moi », même si le processus est douloureux, même si le miroir ne renvoie pas l’image que je souhaite.
Lorsque la nuit se fait noire et me drape de filaments célestes, je fais corps avec le désert et vole à la rencontre de moi-même. L’union est brève, intense et cette fraction de seconde me chuchote que l’existe enfin autrement.
Faut-il être quémandeur pour partir à la recherche de soi ? Je ne sais pas. Je ne sais que l’empreinte au fer rouge dans le sang de ma vie qui me pousse à aller au-delà de la facilité, au-delà du commun. Je ne sais que cette force incontrôlable qui me possède et me projette dans le royaume de l’absolu. Chaque pelure n’est plus qu’un souvenir, abandonnée sur les terres d’une vie fantôme, aux portes des territoires vierges où tout est encore possible. Déchiquetés, broyés, les masques tombent en poussières pour mourir doucement. Dans les bras du sable, la chrysalide s’ouvre en une corolle d’or et s’épanouit à la lumière de l’astre. Dans l’opacité de la nuit, j’entends le chant des sables qui se fond dans l’insondable et je rêve au temps qui doucement s’enfuit.
Je ne peux plus me projeter dans le passé ou regarder en arrière ; la pensée bute sur le présent, obstinément. Tout est plein dans l’instant « T » et seul compte cet instant. Parcourir le passé n’a aucun sens puisque tout prend une autre valeur. Essayer de rebondir avec ses acquis n’est que pure fiction puisque tout est neuf et sollicite d’autres yeux.
Je dois bannir la peur de ma perte d’identité car de cet abandon va naître un autre moi-même. Je dois me laisser dominer et ne plus agir. Alors seulement de plein fouet, je reçois la lumière du désert qui éclaire ma route et me fait découvrir différente. J’accède enfin au dépouillement complet et je sais que je suis prête pour l’autre monde. J’oublie, comme une évidence, mon parcours de vie jusqu’alors pour ne tendre que vers mon moi profond.
« Etre désert » : rêve devenu réalité ; je respire le désert ; je vis le désert ; je sens le désert et je suis désert.